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Papa Mesk, fidèle depuis 30 ans au graffiti et à Fontenay-sous-Bois

04.12.2024

Aujourd’hui, il est artiste à plein temps, dans un modeste atelier dans un quartier paisible de sa ville, Fontenay-sous-Bois dans le Val-de-Marne. Il y a grandi, fait de nombreux graffitis, des fresques et des murs, et il y transmet son savoir-faire dans les écoles en réalisant des ateliers avec des enfants.

On a discuté un moment ensemble et voici un résumé (très court !) de son parcours riche en couleurs, créations, rencontres et moments clefs.

 Pendant  plus  de  10  ans  j'ai  fait  de  la  musique  et  des  graffs  tous  les  jours... 

Quand et comment ça commence le graffiti pour toi ?

Je découvre le graffiti avec mon frère PICT, il était branché dessin et il avait aperçu les premiers graffs. Il se baladait et prenait des photos, notamment au terrain vague de La Chapelle dès 85/86. Ensuite, on y allait souvent avec KEY BEE des TKS. C’est une époque où on n’hésitait pas à faire des kilomètres pour aller voir un seul tag ! J’avais à peu près 13/14 ans.

Puis on a monté notre groupe, UTP pour Underground Tribal Painterz avec mon frère et RANX, puis on a rencontré POP, qui n’était autre que Dany Dan le rappeur des Sages Poètes de la Rue, et d’autres graffeurs comme NUMBER 6, MOVE de Boulogne ou encore REAS. Rapidement RANX, qui était un super tchatcheur, a négocié avec la ville que l’on réalise la grande fresque de l’avenue du Maréchal Joffre, en 1989, et qui est toujours visible. C’était l’une des premières fois qu’une mairie commandait une fresque.

Cette fresque fait 250 mètres de long, on a mis tous les pays avec lesquels la ville était jumelée, ainsi que ceux des différentes communautés de la ville, et elle a été inaugurée le 14 juillet 1989 pour le bicentenaire de la Révolution française. Les gens venaient de partout car on ne pouvait pas la voir autrement qu’en vrai ! Cette fresque a traversé le temps et va fêter ses 30 ans, il y a un projet pour la rénover, l’idée est de la réactualiser, remanier les personnages et modifier certains pays, comme l’URSS qui n’existe plus.

Cette fresque c’était l’opportunité de faire la promotion du graffiti et de la culture hip-hop auprès du grand public. On a aussi montré aux autres groupes que l’on pouvait répondre à une commande qui présente du graffiti, c’était important. Ce projet nous a aussi permis de comprendre que l’on pouvait peut-être gagner notre vie en faisant des graffs, ça nous a ouvert l’esprit.

Tu as des souvenirs du fameux terrain de La Chapelle ?

Oui, bien sûr ! On passait le mur pour aller voir les BBC peindre, des potes breakaient, je m’en souviens comme si c’était hier maintenant que j’en parle ! Il y avait une sorte d’unité, une énergie positive qui étaient liées à la musique hip-hop, c’était la base.

 

D’ailleurs tu faisais aussi de la musique…

Ça a commencé après le graffiti, autour de 92/93, j’étais rappeur et aussi beatmaker pour Dany Dan, Jamalski, Les Sages Po, Azrock, Singuila, et même Napoleon da Legend avec qui j’ai sorti un maxi à ses débuts… J’évoluais aussi dans deux sound systems, Hi Test et So Many Faces, qui existent toujours aujourd’hui, et je tchatchais dans le groupe Légitime Processus de Fontenay, avec entre autres DJ LC, RC, Looranks, Efay et Dondibone.

D’ailleurs, récemment, j’ai un beat sur Beatmakus 4 de RC qui est sorti au début de l’année, et dont j’ai fait le visuel. Pendant plus de 10 ans j’ai fait de la musique et des graffs tous les jours. Je pensais vivre de la musique à un moment, et finalement je suis revenu au graff qui était plus mon truc, ma première passion, et surtout qui payait ! J’ai fait ce choix de vivre la bohème artistique.

THE MYSTERY BLACK BOX!

« J’ai eu cette idée pour fêter mes 30 ans de graffiti en 2016. Une boite mystère éditée à 30 exemplaires, et dans chaque boite un mug et une Estafette customisée, sur une face une lettre, et les 30 Estafette à la suite forment la phrase : MESK1 UNDERGROUND TRIBAL PAINTERZ ; et sur l’autre face le prénom de la personne qui a acheté la boite.

Le truc c’est que personne ne savait ce qu’il y avait dedans !  Je voulais faire un événement avec les gens qui l’avaient commandée, mais c’était vraiment compliqué de réunir tout le monde en même temps ! »

 C'est  comme  ça  que  je  qualifierais  mon  style :  la  lettre  et  garder  l'essence  du  graffiti 

Comment tu décides que le graffiti devienne ta vie ?

J’ai bossé dans une grosse boite d’images pour le cinéma, Mac Guff, où j’étais infographiste, textureur/mappeur. J’ai travaillé sur Chasseurs de dragons et Moi, moche et méchant. En 2009, j’ai ma première fille, je travaillais beaucoup et j’ai souhaité faire autre chose, aussi pour passer plus de temps avec ma famille. Donc j’ai pris cet atelier pour me concentrer sur mon travail personnel.

J’ai fait ce choix de vivre la bohème artistique sans savoir de quoi sera fait le lendemain. Par contre, il faut s’imposer une rigueur, aller à la recherche de taf, il faut aussi anticiper les imprévus.

 

Comment tu définirais ton style ?

À la base je suis un tagueur, mon style vient de la calligraphie, du handstyle comment on dit, le tracé direct. Quand je fais mes toiles, c’est à l’instinct, je n’ai pas de plan et ce que j’aime c’est laisser parler mon cœur. C’est comme ça que je qualifierais mon style : la lettre et garder l’essence même du graffiti.

Qu’est-ce qui te plaît dans le travail en atelier ?

C’est là où je travaille mes toiles, un travail de précision, de minutie, et surtout pour pouvoir créer en en foutant partout… Créer !

 

Tu as un support préféré ?

Les grands murs pour faire des grandes fresques. Sinon le plexiglas en ce moment, j’adore car c’est super lisse et pour certains styles de coulures c’est idéal.

 

Le travail sur toile, ça apporte une certaine crédibilité ?

Je suis passé à la toile il y a plus de 20 ans maintenant, ça n’est pas le même travail, tu es dans un format imposé, c’est une autre approche du graffiti. Ça a mis du temps avant que je sois content d’une toile, aujourd’hui c’est un plaisir. Avec la toile tu fais entrer le graff à l’intérieur, tu as d’autres clients, qui cherchent autre chose et qui sont prêts à mettre un certain prix.

Le Covid perturbe nos vies en ce moment, et il y a eu un confinement total en mars 2020, qu’est-ce qui s’est passé pour toi à ce moment-là ?

Plein de projets sont tombés à l’eau, dont une expo personnelle. C’était une période assez difficile pour les artistes, tu te rends compte que quand tu n’as plus de liens avec les gens, ils ne peuvent plus voir tes toiles, parler avec toi. Ils peuvent acheter en ligne, mais ce n’est pas la même chose que lorsque la personne vient dans l’atelier pour choisir ou voir l’avancée de sa commande.

Pendant le confinement j’ai été beaucoup à la maison pour m’occuper des enfants, et j’allais à l’atelier pour faire quelques commandes. J’ai beaucoup dessiné sur mon iPad avec le logiciel Procreate, tout le monde l’utilise, c’est une tuerie, tu oublies même Photoshop ! Notamment pour faire des graffs car il y a des brush [les outils pour dessiner] développées par des graffeurs et qui reprennent tous les tracés des caps [embouts de différentes tailles] de bombes.

Ce n’est pas une période qui m’a beaucoup inspiré. J’avais pensé faire une série sur le virus car je crois que c’est un moment important à retranscrire, mais ça m’a fait plus tripper de trouver un art casanier, j’ai fait des graffs sur des trains virtuels, c’est comme si je continuais à peindre.

Et surtout j’ai pris le temps de terminer une série de logos détournées que j’avais commencé il y a un moment, j’en ai fait une quinzaine. Ensuite j’ai fait des tirages sur du dibon, et je les ai rehaussés au POSCA [voir ci-dessous]. J’ai aussi eu quelques insomnies, et le fait que toutes les rues soient complètement vides, on pouvait être tranquille pour faire des graffs !

POSCA X PAPA MESK

« J’aime particulièrement les petits POSCA, les PC-1MR avec lesquels je customise des trains ou les Estafette de la Black Box, et la couleur que je préfère, c’est le vert d’eau ! »

LA GALERUE

« C’est une toute petite galerie qui se trouve au coin d’une rue à Fontenay. On peut à peine entrer dedans, mais ça permet d’exposer des toiles que les passants peuvent voir. On m’a proposé d’y exposer. J’ai d’abord peint sur de la toile que j’avais accrochée sur la devanture, donc j’étais sur le trottoir pour travailler.

Ensuite j’ai mis ces grandes toiles dans la galerie ; et après l’expo, j’ai découpé les toiles, et je les ai mises sur des châssis. Ça fait une boucle, ça raconte une histoire. »

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