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La vie ‘chanmé’ de Pieter Ceizer

16.12.2025
 hoodie,  casquette  &  baggy  depuis  31  ans... 

des mots et d’autres

 

L’artiste Pieter Ceizer est installé en France depuis une quinzaine d’années. Originaire de Amsterdam aux Pays-Bas, son parcours a été ponctué de chance, de bienveillance, mais aussi de quelques coups durs.

Du skate au graffiti, Pieter a été immergé dans ces cultures vivaces et intenses. Il en a retenu l’essence, il en retiré la simplicité : les formes et les couleurs. Elles lui servent à former des mots. Ils sont visuels et parfois entremêlés, à la typographie soignée, car c’est à celui qui les lit d’imaginer la suite.

Dans le cadre de son exposition à la galerie Bessaud, KEEP going, qui se termine le 20 décembre, il nous a reçus dans son atelier pour partager son parcours et ses motivations.

https://studioceizer.com
https://www.instagram.com/ceizer

Dans une vidéo que l’on retrouve sur ton site internet, tu évoques le skateboard comme point de départ…

J’ai commencé le skate quand j’avais environ 11 ans. À Amsterdam, il y avait ce spot, Museumplein, c’est là que tout le monde se retrouvait. C’était le terrain de jeu, tout se passait là-bas. J’ai commencé ensuite le graffiti, mais je skatais beaucoup plus que je ne dessinais. Je dessinais les jours de pluie, à la maison.

À l’époque, il n’y avait pas de téléphone portable, pas d’internet, donc si tu voulais voir ou faire un truc cool, il fallait aller sur place. Je pense que cet endroit est un peu le blueprint [que l’on peut traduire par modèle, avec un sens abstrait et global] de qui je suis, et de qui je suis devenu. À 11 ans, j’avais déjà un hoodie [sweat à capuche], une casquette, un baggy. Donc ça fait, allez… 31 ans que je suis un peu toujours ce gamin de 11 ans ! (Sourire.)

Le graphisme du skateboard a été une influence ?

Oui, les t-shirts, les planches, les stickers… Un peu plus tard, j’ai fait mes premiers t-shirts. Tu fais un dessin, tu l’imprimes et tu les vends autour de toi. Je me suis fait un petit nom, et des marques et des magasins m’ont demandé de designer une planche de skate, puis un t-shirt, un flyer… Mes dessins ont commencé à exister comme ça.

Je suis aussi allé dans une école d’art et là, j’ai appris la typographie, la gravure, la photographie… J’ai tout réappris d’une manière plus académique.

 Un  mot,  c’est  minimaliste,  ça  laisse  beaucoup  d’espace  à  tes  propres  idées... 

C’était les dessins, les logos et les lettres qui t’intéressaient ?

À la base, les images ne me touchent pas tellement. Ce sont plutôt les lettres et les couleurs. Les lettres, pour moi, c’est quasiment de l’ordre du spirituel. Quand tu lis ou que tu vois un mot, ça active une pensée, une émotion. Ça me fait, disons, imaginer des choses. Avec une image je ne rêve pas autant, parce que je vois ce que je suis censé voir. Un mot, c’est minimaliste, ça laisse beaucoup d’espace à tes propres idées.

Il y a quelques années, tu as fait une fresque à Ménilmontant à Paris, tu me disais qu’elle avait beaucoup circulé sur les réseaux sociaux, et que l’on t’en parle régulièrement.

« La vie est chanmé » Les Français, ou les Parisiens, disent l’expression chanmé, mais ils ne diraient pas la vie est chanmé. En tant qu’étranger, je colle les mots ensemble avec mon français, et ça n’est pas toujours naturel. Ce que j’aime, c’est que chanmé, le verlan du mot méchant, exprime quelque chose de positif. Et quand j’ai fait cette fresque, j’étais au point le plus bas dans ma vie, je venais de rompre, je n’avais plus d’appartement… C’était un nouveau départ.

Je l’ai faite sur une palissade en bois devant un futur restaurant de burgers, Blend, en travaux. C’est Victor, le gérant, qui m’avait proposé de peindre dessus. Je suis venu avec quelques potes, on a peint, on a mangé des hamburgers, c’était vraiment un très bon moment.

Parfois quand tu lèves les yeux, il peut y avoir des traces de vieilles publicités pour le savon des années 60 sur des immeubles à Paris, avec ces lettres très datées. J’ai dessiné cette fresque dans ce style, un peu rétro. Ça évoque quelque chose en toi, un sentiment nostalgique, c’est ce que j’aime activer.

 et  j'ai  compris  que  c'était  leur  travail ! 

Qu’est-ce qui t’a poussé à venir vivre en France ?

L’une des premières fois que je suis venu, c’était au début des années 2010. J’ai rencontré les graffeurs PSYCKOZE et JonOne, grâce à SUPE. J’ai vu leurs ateliers, leurs grandes peintures, et j’ai compris que c’était leur travail ! J’ai réalisé qu’en Hollande, je ne connaissais pas de gens comme ça, en tout cas rien de comparable.

PSYCKOZE [voir l’image ci-dessus] c’est quelqu’un de très gentil, un peu hippie. Quand je le rencontre, je lui montre un carnet de dessins, et on a accroché. Il m’a proposé de venir dans son atelier quand je voulais. J’y ai passé beaucoup de temps à dessiner, c’était à Mairie des Lilas, il était, et il est toujours, avec L’ATLAS et JonOne.

Ce que j’aime beaucoup ici en France, c’est que j’ai l’impression qu’il y a une attention et de une appréciation pour l’art en général. Les Français le considèrent comme un métier, là où en Hollande on te dira « Tu es artiste ? Va te trouver un boulot. » Ici, c’est plutôt : « Oh, tu es artiste, super ! »

Tu es allé dans les Catacombes avec PSYCKOZE ?

Non, non, je suis claustrophobe ! La première fois qu’il me l’a proposé j’étais d’accord, je pensais que c’était pour s’y balader une heure, et là il me parle d’y passer toute la journée !

KEEP going, l’exposition, le livre…

« Quand j’ai quitté mon ancien atelier, j’ai rangé mes boîtes de dessins qui contenaient beaucoup de croquis pour des travaux que j’ai réalisés par la suite. Je les ai scannés et classés, et j’en ai fait un livre. On a décidé d’en faire une expo avec Arthur [Bessaud] où tous ces dessins originaux sont exposés.

C’est souvent comme ça que je commence : je m’assois avec du papier, j’écris des mots, je m’amuse. Que ce soit moche ou pas, peu importe, je suis libre et c’est ça l’essentiel : le plaisir de créer.

C’est aussi ce que je voulais montrer avec ce livre et l’expo, quand tu vois une peinture finie, impeccable, parfois ça peut donner l’impression de sortir d’une imprimante. Mais quand tu vois un dessin, une esquisse, sur papier, tu comprends que cette peinture provient d’une simple idée.

Tout est point de départ et c’est quelque chose d’universel. N’importe qui peut avoir une idée et à partir de cette idée tu peux créer autre chose. »

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